Pour réduire les émissions dans l’environnement bâti, il faut tenir compte de l’ensemble du cycle de vie d’un bâtiment et des émissions qui en découlent. Les émissions de carbone intrinsèques sont celles qui résultent de la fabrication et de la transformation des matériaux du bâtiment. Ces émissions sont souvent qualifiées de « cachées » et ne sont donc pas prises en compte dans l’évaluation des émissions potentielles d’un bâtiment. Lors de l’évaluation du bâtiment dans le cadre d’une analyse du cycle de vie (ACV), la consommation d’énergie opérationnelle n’est plus le principal facteur de création d’un bâtiment durable. Le carbone intrinsèque est le nouvel horizon de la durabilité. Les bâtiments sont une source majeure d’émissions de gaz à effet de serre (GES), et pas seulement du point de vue de l’énergie qu’ils consomment après leur construction.
Une étude suisse, qui a analysé plus de 650 ACV, a révélé que le carbone intrinsèque peut avoir une influence encore plus grande sur la durabilité globale des bâtiments « économes en énergie. » Les émissions de carbone intrinsèque représentent une part beaucoup plus importante des émissions globales à mesure que l’efficacité énergétique globale des bâtiments augmente: « alors que la part moyenne des émissions de GES incorporées des bâtiments conformes aux réglementations actuelles en matière de performance énergétique est d’environ 20 à 25% des émissions de GES sur l’ensemble du cycle de vie, ce chiffre passe à 45-5 % pour les bâtiments à haute efficacité énergétique et dépasse 90% dans les cas extrêmes. » L’étude examine également le « pic de carbone » dans les émissions associées à la construction d’un bâtiment.
Lorsque l’on considère les matériaux et le carbone intrinsèque d’un bâtiment, il convient d’accorder une attention particulière à l’enveloppe du bâtiment, c’est-à-dire à la couche extérieure qui protège le bâtiment des conditions environnementales. Le béton est souvent utilisé dans la production de l’enveloppe d’un bâtiment, en raison de ses excellentes propriétés en matière d’efficacité thermique. Cependant, l’utilisation de matériaux résistants comme le béton s’accompagne souvent d’importantes émissions de gaz à effet de serre lors de la production, du transport et de la construction des matériaux de construction.
Le choix des matériaux est l’un des facteurs les plus importants pour réduire les émissions de carbone intrinsèques. Lors de l’évaluation des fondations et de la composition du bâtiment, en particulier de son enveloppe, le béton peut être considéré comme l’un des matériaux les plus émissifs. Cela est dû à la production très émettrice de l’ingrédient actif du béton, le ciment. Le ciment est le principal ingrédient actif du béton et il est responsable de plus de 70% des émissions du béton en raison du processus à forte intensité de carbone utilisé pour le fabriquer. Afin d’améliorer le taux d’émissions des enveloppes de bâtiments, le statut du ciment dans le mélange de béton doit être pris en compte.
Pour ce qui est de l’avenir, de nombreux États et organismes intergouvernementaux ont désigné 2050 comme une année charnière pour le développement durable, et de nombreuses feuilles de route espèrent parvenir à des émissions nettes de carbone nulles d’ici à 2050. Selon la Palette de matériaux Carbon Smart d’Architecture 2030, qui vise à réduire les émissions de carbone intrinsèques dans l’environnement bâti, « le carbone intrinsèque sera responsable de 72% des émissions de carbone associées aux nouvelles constructions dans le monde d’ici à 2030. » Les bâtiments produisant moins d’émissions de carbone pendant leur durée de vie, les émissions liées à leur production deviennent un facteur plus important dans l’analyse du cycle de vie.
La Palette des matériaux intelligents en matière de carbone désigne l’optimisation de la composition du béton comme essentielle à la réduction du carbone intrinsèque. La palette établit une corrélation directe entre la teneur en ciment du béton et son niveau d’émissions de carbone intrinsèque. En fin de compte, « utiliser moins de ciment est le moyen le plus efficace de réduire l’empreinte carbone du béton. » Un rapport de RMI de 2013 sur la réduction du carbone intrinsèque dans les bâtiments propose que dans le secteur du béton, une réduction de 14 à 33% des émissions peut être obtenue à un coût faible ou nul, simplement en optimisant le mélange de béton et en prenant en compte des matériaux à faible teneur en carbone incorporé ou séquestrant le carbone dans la composition de l’enveloppe du bâtiment.
Il sera impossible de réduire l’impact de notre environnement bâti sur le climat sans tenir compte des émissions de carbone intrinsèques dans ses matériaux. Depuis 2010, bien que les émissions globales provenant de l’exploitation des bâtiments aient légèrement diminué, les émissions liées à la construction ont en fait augmenté de 1,5%. Les émissions de carbone intrinsèques jouant un rôle plus important dans notre empreinte carbone, des développements tels que le béton sans ciment de CarbiCrete sont importants pour créer un plan viable vers des émissions de carbone nettes et nulles d’ici 2050.